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  • Photo du rédacteurPhilippe Moreau

Trans-Australia 2018 J 21

Dernière mise à jour : 18 oct. 2018

Etape 21 – Ceduna - Penong // 90,90km – 15h31’

Réparatrices ou non, les nuits sont toujours aussi courtes. Il est 3h40 et le 4x4 s’enfonce dans l’obscurité de la campagne australienne. On dépose Philippe très exactement 16,6 kilomètres avant Ceduna. Dès les premiers kilomètres il passe en « mode course ». Envie de terminer cette étape le plus rapidement possible ? Assurément oui, mais ce n’est pas la raison première. Notre coureur souffre toujours du tendon, et la marche se révèle être plus douloureuse que la course… le choix est donc vite fait.

Notre ville étape d’hier, Ceduna, ne verra finalement pas passer notre coureur. Les GPS ont encore fait des merveilles en nous trouvant le raccourci du jour : une piste qui coupe en diagonal, à travers champs et par le nord-est, nous faisant ainsi économiser 2,5 kilomètres. On gratte, on gratte. Certes, le challenge principal reste de traverser l’Australie en courant, mais trouver le chemin le plus court pour y parvenir est une sorte de défi à travers le défi que nous prenons soin de relever.

Que Philippe ne traverse pas Ceduna ne va pas m’empêcher de vous parler de cette ville : 2 289 habitants au dernier recensement, ce qui en fait, depuis Port Augusta et Broken Hill, la première ville que nous traversons à dépasser le millier d’habitants. Considéré comme la « porte d’entrée » du désert de Nullarbor, cette dernière oasis avant le grand vide est généralement une halte bienvenue pour tous les voyageurs qui veulent faire le plein de provisions. Et ça tombe bien car Ceduna en aborigène veut dire « un endroit où s’asseoir et se reposer ». Phrase que nous avons pris au pied de la lettre hier soir. Sa proximité avec la mer a vu l’élevage et le commerce de l’huître du Pacifique fortement s’y développer, jusqu’à être reconnu dans tout le pays, ainsi que plus récemment, l’arrivée de plusieurs industries spécialisées dans la pêche au large et dans celle du thon rouge. Miam.


En arrivant hier à Ceduna, il est vrai que nous avons été interloqués de voir autant d’aborigènes zoner dans les rues. Je ne sais pas si « zoner » est le terme adéquat, en tout cas je ne l’entends pas de manière péjorative, mais il est clair que l’attitude des aborigènes dénotait d’une certaine rupture avec le reste de la ville et de ses habitants. Néanmoins nous avons tout autant été surpris d’apprendre que ces gens ne sont pas forcément dans la misère que l’on imagine, et qu’avec les différentes aides que leur donne le gouvernement, ils s’en sortent parfois mieux que certains australiens. Mais preuve en est que l’argent ne fait pas tout, surtout lorsqu’il est question d’intégration. Et il n’y a pas besoin de passer plusieurs jours à Ceduna pour constater ce décalage entre l’Australie « moderne » et le peuple aborigène, surtout dans une ville autant basée sur le tourisme. Nous aurons l’occasion de reparler de cette relation très compliquée entre les aborigènes et leur pays, car nous traverserons une réserve dans quelques jours, et le moment sera alors bienvenu de s’intéresser à leur histoire depuis l’arrivée des colons.


En attendant retour à la course et à notre piste. En plissant les yeux, Philippe aperçoit quand même un bout de l’océan depuis celle-ci. Allez, la prochaine fois qu’il reverra la mer, ce sera sur la jetée de Fremantle, au sud de Perth. Croisons les doigts pour que ce soit avec un record entre les mains. La piste se termine aussi vite qu’elle est apparue et nous voilà de retour sur le bitume avec toute la circulation que cela implique : en grande majorité des caravanes et des camions. Car oui, les Australiens sont des mordus de la caravane. Des fondus même. Cette semaine, nous avons croisé un nombre incalculable de véhicules tractant une caravane à l’arrière. Nous avons d’ailleurs eu l’occasion de voir dans les quelques « caravan park » où nous avons séjourné, de sacrés spécimens tout équipés avec télévision, barbecue et compagnie. Les camions d’aujourd’hui sortent eux aussi le grand jeu, et l’on croise bon nombre de modèles avec des roues à n’en plus finir, certains allant jusqu’à 72 pneus !


Philippe a le vent dans le dos aujourd’hui. Malheureusement il stagne, et sa moyenne de 6 km/h, pourtant réglée comme une horloge, ne décolle pas. Ce qu’on imaginait être une mise en jambe est plutôt une sorte de plafonnage. Notre coureur s’est fixé un maximum de 16h par jour sur les routes. Sinon il n’a pas assez de temps pour récupérer. Sauf que 16 heures à 6km/h, cela nous donne un total de 96 kilomètres. Ce qui explique d’ailleurs la distance d’hier, où notre coureur n’a pas réussi à aller plus vite. C’est problématique car, par rapport à la moyenne de 101 kilomètres qu’il s’était fixé, il laisse chaque jour filer quelques kilomètres qui risquent de s’accumuler et peser lourd dans la balance sur les derniers jours.


Au 36ème kilomètre nous faisons notre première rencontre avec un de ces voyageurs « fous ». Yann, un allemand qui a débuté son tour de l’Australie à vélo il y a maintenant un an et demi. Il a commencé à Sydney et est parti vers le nord. Bientôt la fin donc. Des panneaux solaires posés sur ses sacs à l’arrière, une petite enceinte placée au milieu du guidon et sa tente accrochée à l’avant. Autonomie totale. On lui demande si ce n’est pas trop difficile, et il nous répond que sa seule préoccupation quotidienne est de savoir dans quel sens le vent va souffler. De face il ne parcourt que 100 kilomètres, et de dos il peut pousser jusqu’à 200 bornes. On lui souhaite bonne route !


En milieu de matinée les moustiques viennent se mêler au balai incessant des mouches. Double combo. Que du bonheur. On sort les filets pour tête plus vite qu’à l’accoutumée. D’ailleurs, si vous avez aimé la section chiffrée d’hier, sachez qu’on estime à 70 billiards (oh my godness) le nombre de moustiques sur Terre. Soit bien plus que de mouches. Et si mes calculs sont bons, cela nous donne 10 millions de moustiques pour un seul être humain. Voilà je laisse ça là, vous en faites ce que vous voulez.


L’après-midi défile et notre coureur perd en forme. Le visage se ferme peu à peu, et l’on sent bien qu’il n’a plus le jus des premiers jours. Il décide d’arrêter son étape à 90,90 kilomètres car il se dit « complètement gazé ». Nous sommes persuadés qu’une fois le soleil couché (aux alentours de 18h30) cela lui coupe complètement les jambes. Nous allons donc à partir de demain mettre en place un départ 10 minutes plus tôt qu’à l’accoutumée, pendant trois jours jusqu’à partir à 3h30 du matin. L’idée étant que Philippe affronte le période « de nuit » essentiellement le matin, là où il est le plus frais, et termine en même temps que le jour se couche. On espère ainsi pouvoir lui faire retrouver sa moyenne de 101 kilomètres par jour tant espérés. Ce soir nous revenons quelques kilomètres en arrière pour séjourner à Penong. A demain.



Total de kilomètres parcourus : 1 983,6 kilomètres

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