Etape 09 – Ivanhoe – 84km avant Menindee // 91km – 15h26’
Promis, aujourd’hui je vais essayer de ne pas parler de kangourous. Cela fait maintenant une semaine qu’ils sont les têtes d’affiche de chaque compte-rendu, alors il est temps de laisser place à d’autres protagoniste. Ce matin nous reprenons la route un peu après Ivanhoe, petite bourgade de 200 habitants, dont le poste de police compte… deux officiers ! Nous retrouvons notre chère et tendre piste en ce neuvième jour de course. Et notre voie ferrée bien sûr. Une chose étrange nous interpelle dès le début de course : la lune. Elle est encore haut perchée dans le ciel et semble en avoir minimum pour au moins une heure de voyage avant d’aller se coucher. Mais alors qu’est-ce qui, hier à la même heure, à provoquer ces puissantes lumières rouges au loin dans le ciel si ce n’est un coucher de lune ? Avec David « Vincent » on ne sait plus quoi penser…
Mais mis à part cette entrée en matière assez science-fictionesque, la journée est d’un classicisme à toute épreuve. Le soleil se lève, jusque là tout va bien. Suivent les oiseaux, rien d’anormal. Deux superbes perruches rouges et blanches se laissent tirer le portrait, en virevoltant de temps à autre histoire de garder leurs distances. Puis vient notre perruche à nous, la Philippus Moreausus, qui elle aussi virevolte de mieux en mieux. Sa patte droite continue de lui faire mal, mais plus par à-coups que de façon continue. Elle a retrouvé une certaine légèreté dans sa foulée, ce qui lui permet de progresser de 6 kilomètres par heure. Avec encore une fois la barre des 90 kilomètres comme objectif pour cette fin de journée.
Le problème reste que, chaque étape où les 100 kilomètres ne sont pas atteints devient une étape « malussée », et il faudra bien un jour où l’autre combler cette différence par rapport à la moyenne quotidienne établie par le meilleur chrono mondial. Ceci étant, cela est exact dans le cas de figure où notre route est identique à celle de Patrick Malandain, l’actuel détenteur du record. Et si l’on connait son parcours dans les grandes lignes, nous ignorons le tracé exact que ce dernier a pris. Il serait donc utopiste de tout miser sur le simple fait de tenir une moyenne journalière supérieure à la sienne. D’autant qu’il existe d’autres impondérables, comme par exemple les différences possibles entre un tracé réalisé au préalable sur un logiciel (type google map ou openrunner), et la distance réelle affichée par la montre du coureur en fin d’étape, qui peut d’ailleurs varier selon les montres et cela même sur des modèles identiques…
Compliqué hein ? Mais comme dirait Serge, rien ne sert de trop calculer, la vérité se fera au niveau du chronomètre. Car c’est bien ce dernier qui validera ou non le record, et non le nombre de kilomètres parcourus. Pour le moment, l’important est d’en finir avec la région du New South Wales en rejoignant Broken Hills, et une fois là-bas de faire les comptes. Car la deuxième partie de la traversée sera bien moins sujette à des « choix de route ». En attendant, nous savons pertinemment qu’une moyenne de 80 ou 90 kilomètres par jour ne sera pas suffisante pour battre le record établi. Il faut donc que notre coureur retrouve très rapidement sa capacité à courir 100 kilomètres de façon quotidienne.
Voilà pour le point technique. Aujourd’hui le vent souffle fort sur les steppes australiennes, ce qui a pour effet de maintenir la température aux alentours d’une vingtaine de degrés. Le paysage est conforme aux journées précédentes. Un amas de brousse, de bosquets et d’arbres biscornus, tous d’une couleur gris-brune, avec un peu de terre ocre sur le sol. Rien de très joli, mais ça reste complètement dépaysant. On comprend aisément pourquoi cette région n’est pas touristique. Vivre ici relève plus de la survie qu’autre chose. Surtout qu’à l’heure où je vous parle, nous venons à peine d’entamer le printemps, alors qu’en plein été la température augmente drastiquement et le nombre de mouches avec. En fait cet endroit n’est même plus vraiment le bush mais plutôt l’outback (« l’arrière-pays »). Ce sont des terres où beaucoup d’Australiens n’ont jamais mis et ne mettront jamais les pieds car ils ne voient pas l’intérêt de venir ici. Et on ne peut pas leur donner totalement tort.
En ce qui nous concerne, je trouve que c’est là que réside tout l’intérêt de participer à ce genre de courses. Oui les journées peuvent être longues, et là tout de suite je dois vous avouer que je trouve cette piste quelque peu interminable, mais je me sens comme privilégié de fouler ces terres que je n’aurais à l’évidence jamais traversé d’une autre manière que par le biais de cette aventure. C’est une certaine façon de voir l’envers du décor plutôt que la vitrine, et ainsi de comprendre un pays dans sa globalité. Peu importe que l’accent australien soit à votre portée ou non, il suffit de traverser ces villages ou d’y passer une nuit pour s’imprégner de l’ambiance, de la vie qui s’y trame, et dans ce genre de situation les mots importent peu afin de comprendre ce qui nous entoure.
C’est sur ces notes philosophiques que je vous laisse pour aujourd’hui. Philippe termine avec un kilométrage de 91km pour 15h26 passées sur la route. On a senti l’élève Moreau très concentré tout au long de la journée, très assidu à sa tâche et déterminé à perdre le moins de temps possible sur la route. Car il est bien conscient qu’une guérison de sa tendinite passera par une bonne récupération, c’est-à-dire un temps de repos maximal et donc le moins possible de minutes passées à courir. CQFD. A demain.
Total de kilomètres parcourus : 844,8 kilomètres
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